dimanche 13 janvier 2019

1894 - Claude-Henri Grignon


Claude-Henri Grignon

8 juillet 1894 - 3 avril 1976

Né à Sainte-Adèle le 8 juillet 1894. Il fréquente pendant deux ans le collège Saint-Laurent puis poursuit ses études avec des professeurs en pratique privée. Sa formation est surtout celle d’un autodidacte. Agent de douanes à Montréal, puis agent de publicité au ministère de l’Agriculture à Québec, il publie son premier article dans L’Avenir du Nord en 1916.

Il collabore à divers journaux et revues : Le Nationaliste (1921-1922), La Minerve (1920), La Nation de Québec (1930), Le Canada (1931-1934), L’Ordre (1934-1935), La Renaissance (1935).

De 1937 à 1939, il dirige la page littéraire d’En avant. À partir de 1941, il rédige une chronique pour Le Bulletin des agriculteurs qu’il poursuivra jusqu’en 1970. Membre de l’École littéraire de Montréal de 1920 à 1926, il fonde en 1936 un périodique qui sera célèbre dès sa parution : Les Pamphlets de Valdombre. Il y signe, jusqu’en 1943, de nombreux articles où il ne manque pas de se mesurer à ses adversaires littéraires et politiques.

Paru en 1933, Un homme et son péché demeure son œuvre majeure. Ce roman lui vaut le prix David en 1935. Les adaptations de cette œuvre, pour la radio à partir de 1939, pour le cinéma en 1948 et 1949, et pour la télévision entre 1956 et 1970, ont contribué à faire entrer dans la légende ce fameux personnage bénéficiant d’une grande popularité auprès du public canadien-français.

Maire de Sainte-Adèle de 1941 à 1951, Grignon est admis à la Société royale du Canada en 1962. Il consacre ses derniers loisirs à la rédaction de ses Mémoires et meurt le 3 avril 1976.

Chronologie

1894
Naissance de Claude Henri Grignon, le 8 juillet, à Sainte-Adèle-en-Haut, comté de Terrebonne, fils de Wilfrid Grignon, médecin, et d'Eugénie Baker, cadet d'une famille de neuf enfants. Baptisé sous le nom d'Eugène Henri.

1907
Décès de sa mère.

1908
Son père se remarie avec Hermine Longpré.

1908-1910
Après ses études primaires à l'école du village, il entre au collège Saint-Laurent où il fait ses classes d'Éléments latins et de Syntaxe. S'adapte difficilement. Se lie d'amitié avec Louis Francoeur, qui le ramènera plus tard à la religion abandonnée durant l'adolescence.

1910-1912
Poursuit ses études avec des précepteurs particuliers:le comte Maurice de Kervyn à Sainte-Adèle et ensuite l'inspecteur Jean Baptiste Primeau à Saint Jérôme. Préfère l'école buissonnière.

1912
S'inscrit à l'institut agricole d'Oka où il étudie pendant un an et demi. Lit Balzac, Flaubert, Stendhal, Hugo.

1916
Très affecté par le décès de son père, survenue le 23 juin 1915, il découvre les Confessions de Jean-Jacques Rousseau et sa vocation littéraire. Déménage à Montréal pour gagner sa vie et devient fonctionnaire fédéral. Épouse Thérèse Lambert de Saint-Gabriel de Brandon, le 2 septembre (qui décèdera le 20 Janvier 1984).

Commence sa carrière journalistique à l'Avenir du Nord de Saint- Jérôme, dirigé par Jules-Édouard Prévost, en publiant son premier article le 29 septembre, sous le pseudonyme de Claude Bâcle. Continuera à collaborer à cet hebdomadaire libéral plus ou moins régulièrement jusqu'en 1925 et de 1929 à 1945.

1920
Date probable de la première rencontre avec Olivar Asselin, qui deviendra son ami et son maître. Entre, le 24 novembre, à l'École littéraire de Montréal. Collabore à la Minerve dirigé par Arthur Sauvé et signe Valdombre pour la première fois. Jusqu'en 1936, il s'adonnera surtout à la critique littéraire sous de nombreux pseudonymes.

1921-1922
Collabore au Nationaliste dirigé par Ernest Shank.

1922
Début de la correspondance entre Asselin et Grignon, le 26 décembre. Publie un pamphlet, les vivants et les autres, en réponse à la conférence Franchises de Victor Barbeau. Il s'attaque aux "exotistes".

1922-1923
Collabore au Mâtin dirigé par Roger Maillet.

1925
Publie un important article intitulé "Léon Bloy. Le Pamphlétaire - Le Poète" dans les Soirées de l'École littéraire de Montréal.

1926
Achète la maison de son frère Louis à Sainte-Adèle, où il s'établira en 1930.

1928
Publie le Secret de Lindbergh et le présente au Prix David de 1929. Adopte sa nièce Claire Grignon, fille de son frère aîné René.

1930
Revient à Sainte-Adèle, où il espère vivre de sa plume. Collabore à la Nation de Québec et à la Vie canadienne. Fonde le Cri du Nord à la demande du candidat conservateur André Fauteux.

1931
Critique hebdomadaire au Petit Journal dirigé par Roger Maillet. Se met à la recherche d'un emploi.

1931-1933
Collabore jusqu'en 1933 au Canada dirigé par Olivar Asselin.

1931-1934
Collabore à la Revue Populaire.

1932
Employé pendant quelques mois comme surnuméraire au titre d'inspecteur des fonds de chômage au ministère de la Colonisation.

1933
Connaît de graves difficultés financières au creux de la crise économique et est à nouveau à la recherche d'un emploi, en particulier au ministère de la Colonisation avec le concours d'Olivar Asselin. Publie Ombres et Clameurs (recueil de critique) qu'il présente au Prix David. Publie Un homme et son péché, qu'il présente au Prix David. Rédige des récits, probablement ceux qui paraîtront en 1934.

1934
Nommé publiciste adjoint au ministère de la Colonisation, il s'installe à Québec le 1er novembre. Publie le Déserteur et autres récits de la terre.

1934-1935
Collabore à l'Ordre dirigé par Olivar Asselin et à Vivre, revue dirigé par Jean-Louis Gagnon.

1936
Le 16 janvier, à l'Académie commerciale de Québec, donne une conférence intitulée "l'Histoire d'un livre", qui sera publiée sous le titre : Précisions sur Un homme et son péché. Nommé publiciste et conférencier pour le ministère de la Colonisation à Sainte-Adèle.

Retour dans son "pays", le 17 avril. Lance les Pamphlets de Valdombre, revue littéraire et politique qui paraîtra jusqu'en 1943. Publie Précisions sur Un homme et son péché. Nommé membre du jury du Prix David (le sera également en 1941). Collabore à l'Émerillon. Remercié de son poste de publiciste et conférencier par Maurice Duplessis.

1937
Devient directeur littéraire, jusqu'en 1939, du journal En Avant fondé par T.-D. Bouchard, où il signe également des articles politiques. Il collabore aussi, durant deux ans, à la revue la vie au grand air. Décès de son ami Olivar Asselin.

1938
Rédige une adaptation radiophonique du Déserteur pour CBF avec la collaboration de sa cousine, Germaine Guèvremont: la série des sketches dure un an.

1939
Rédige une adaptation d'Un homme et son péché pour CBF, sous le même titre, qui durera du 11 septembre 1939 à 1962. CKVL la reprend, remaniée, de 1963 à 1965. Collabore à la revue moderne.

1939-1941
Rédige la Rhumba des radio-romans qui dure deux ans à CBF. Réédite le Déserteur et autres récits de la terre.

1940-1943
Rédige deux chroniques dans Paysana, revue dirigée par Françoise Gaudet-Smet. Rédige "Au restaurant d'en face", radio-roman qui dure un an à CBF. Élu maire de Sainte - Adèle ; il le restera jusqu'en 1950. Décès de son ami Louis Francoeur.

1941-1970
Publie plus de 300 contes, sous le titre "du Père Bougonneux", dans le Bulletin des Agriculteurs.

1942
Crée, à partir d'Un homme et son péché, des paysanneries, pièces à tableaux, jouées partout au Québec et en Ontario, de 1942 à 1953. Élu président de la Commission scolaire de Sainte - Adèle, où il siège jusqu'en 1947. Rédige "Monsieur Balthazar" radio - roman qui dure quatre mois à CBF.

1945
Candidat à la mairie, lance la Scandaleuse administration Valiquette "pamphlet publié et rédigé par C.-H. Grignon à Sainte-Adèle". Élu préfet du comté de Terrebonne. Reçoit de Radio - Canada le prix "Beaver Award for Distinguished Service".

1949
Sortie du film Un Homme et son péché, tiré du roman, par Québec - Productions, avec scénario de l'auteur. Réalisateur : Paul L'Anglais ; metteur en scène : Paul Gury Le Gouriadec.

1949-1954
Émission hebdomadaire au poste de radio CKAC intitulée "Journal parlé de Claude Henri Grignon" opinions et commentaires sur la politique, la littérature et autres domaines. Première émission, le dimanche 6 novembre.

1950
Sortie du film Séraphin, tiré de sketches radiophoniques, par Québec - Productions, avec scénario de l'auteur qui joue aussi un rôle. Le troisième film de la trilogie, Donalda ne sera pas tourné.

1951-1970
Parution du "Séraphin illustré" dans le Bulletin des Agriculteurs, bandes dessinées par Albert Chartier, avec des textes de Claude Henri Grignon. 228 planches de 12 cases on été produites de octobre 1951 à septembre 1970.

1954-1956
Parution de "Séraphin" roman-feuilleton, nouvelle création tirée d'Un homme et son péché, dans la revue Bonne Soirées.

1955-1956
À partir du 20 octobre, parution, dans la revue Bonnes Soirées, de "Ti - Prince" feuilleton inédit sur le fils de Séraphin.

1956-1970
Rédige une autre adaptation d'Un homme et son péché, sous le titre "Les Belles Histoires Des Pays D'en Haut" pour Radio-Canada qui durera 14 ans.

1960
Entreprend un ouvrage sur "Olivar Asselin, le pamphlétaire maudit", qu'il ne pourra pas conduire a terme. Intervient dans la campagne électorale en faveur de l'Union nationale dirigée par Antonio Barrette.

1962
Élu à la Société royale du Canada.

1963
Collabore à Profils littéraires, 7eme Cahier de l'Académie canadienne-française avec un article intitulé "Arthur Buies ou l'homme qui cherchai son malheur".

1967
Fondation du Village de Séraphin à Sainte-Adèle.

1967-1968
Collabore au Journal des Pays d'en haut, où il rédige assez souvent l'éditorial et écrit une série d'articles intitulés "Les libraires, ces bon maîtres".

1972
Devient Compagnon de l'Ordre du Canada.

1976
Décède le 3 avril, à Sainte-Adèle à l'age de 81 ans.


Chronologie - Tiré du livre de Antoine Sirois et Yvette Francoli, " Un Homme et son péché Édition critique "

Les Presses de l'Université de Montréal 1986

Photo - Collection Jean Layette

2016 - Vincent Leclerc


Vincent Leclerc

«Qu'il soit dirigé en français comme en anglais, ici comme ailleurs, Vincent Leclerc maîtrise un jeu franc et totalement habité, allant là où on ne l'attend pas.»

Comédien talentueux et versatile, Vincent Leclerc se fait remarquer autant au petit qu’au grand écran, en plus de jouer en français et en anglais. Sur scène, on a pu le découvrir dans Lucidité passagère, Trout Stanley ou encore La Belle et la bête, en tournée européenne.

Au cinéma, il a été dirigé par plusieurs réalisateurs de renom comme Rolan Emmerich (White house down), Jonathan Levin (Warm bodies), Martin Doepner (Rouge sang), et Sylvain Archambault (Piché, entre ciel et terre). De plus, on a pu le voir dans le film oscarisé The Revenant, d’Alejandro González Iñárritu. Vincent est de la distribution du prochain film de Denys Arcand, La chute de l’empire américain qui sortira à l’été 2018.

Au petit écran, il a tourné dans plus d’une trentaine de productions comme Mauvais Karma, Being human, Toute la vérité, Mirador, 19-2, Les Beaux malaises, Le Clan, This life (l’adaptation anglophone de la télésérie Nouvelle Adresse), Bad Blood, Bellevue. Pour son rôle dans la websérie Coming out, il a obtenu une nomination aux Prix Écrans canadiens 2016 dans la catégorie Best Performance in à Program or Series Produced for Digital Media.

Vincent incarne de façon éloquente le mythique personnage de Séraphin Poudrier dans la télésérie Les pays d’en haut, diffusée à Radio-Canada. Ce rôle lui a permis d’obtenir une nomination au Gala Artis en 2016, 2017 et 2018 dans la catégorie Rôle masculin – télésérie québécoise ainsi qu’un prix Gémeaux pour Meilleure interprétation premier rôle masculin en 2016 et une nomination dans la même catégorie l’année suivante.

Nous pouvons voir Vincent depuis cette année dans la populaire émission District 31 dans le rôle de Maxime Vézeau.


Vincent Leclerc - Séraphin Poudrier


Texte provenant du site web de l’Agence Karine Lapierre.

Photo - Collection Jean Layette

2002 - Pierre Lebeau


Pierre Lebeau

22 Juillet 1954

Pierre Lebeau (né le 22 juillet 1954 à Montréal, Québec) est un Acteur Canadien. Il est surtout connu pour des rôles importants dans des films de grande surface au Québec tels que Séraphin : Un homme et son péché et la série Les Boys.

Sa carrière d'acteur a commencé sur la scène théâtrale en 1975, après des études à l'école nationale de théâtre, Il a joué dans diverses pièces jusqu'aux années 1990 et une télésérie en 1978. Cependant, c'est en 1997 que sa carrière est devenu plus important avec son premier grand rôle dans Les Boys, jouant le rôle de Méo, qui est un ami de Stan (joué par Rémy Girard) et homme d'affaires qui menacent de prendre le bar de Stan si son équipe de hockey de ligue de garage parviens à vaincre son équipe composé de plusieurs joueurs bagarreur.

Le deuxième film, Méo joue dans l'équipe de Stan après son remplacement par un joueur. Lebeau a joué dans tous les films Les Boys et jouera également dans la mini-série de télévision 2007 ainsi que la plupart des mêmes acteurs qui ont participé pour la partie ou la totalité de la tétralogie, notamment, Marc Messier, Serge Thériault, Patrick Huard, Rémy Girard, Yvan Ponton et Patrick Labbé.

Second rôle majeur Lebeau a été le principal protagoniste dans Séraphin : Un homme et son péché (mettant en vedette Roy Dupuis et Karine Vanasse), dans lequel il joue le rôle de Séraphin, le maire d'un village fictif et un avare mesquin. Lebeau, pour son rôle dans le film de 2002 produit par Charles Binamé, mériteras le Prix Jutra, du meilleur acteur.

Lebeau a également joué dans divers films et séries télévisées, dont la Nouvelle-France, L'Incomparable mademoiselle C, Bon Cop, Bad Cop , Fortier, Matroni et Moi, Les Dangereux, l'Odyssée, Urgence et Un gars, une fille.


Pierre Lebeau - Séraphin Poudrier


Photo - Collection Jean Layette

1956 - Jean-Pierre Masson


Jean Pierre Masson

25 août 1918 - 11 Mars 1995

Jean-Pierre Masson naît le 25 août 1918 à Sainte-Agathe dans les Laurentides. Il a vécu sa jeunesse dans la misère. Son père est mort lorsqu’il était très jeune et sa mère cousait la nuit, pour faire vivre ses six enfants. À la suite du décès de son père, sa mère place ses enfants dans un orphelinat. Jean-Pierre a gardé un excellent souvenir des sœurs qu’il a connues. La communauté religieuse payait ses études classiques au Séminaire de Saint- Hyacinthe.

Aux dires de ses anciens camarades du Séminaire, Jean-Pierre aimait beaucoup participer aux représentations de théâtre. Il apprenait ses textes à la dernière minute et n'aimait pas se faire dire par les autres acteurs qu’il était paresseux parce qu’il n’apprenait pas ses textes à temps. Malgré ce défaut, il était très bon et très populaire, il n’acceptait pas que les autres aient des blancs de mémoire, même si ça lui arrivait souvent; il était perfectionniste et un peu soupe au lait. Mgr Gérard Dupuis raconte : « Alors, il arrivait que dans les répétitions, à un moment donné, il improvisait. Il embarrassait ses compagnons, nécessairement, ça les embêtaient, ils ne savaient pas quoi répondre, ils étaient perdus. Il cherchait à frôler le décor pour que le souffleur lui donne la réplique qu’il devait dire. C’était quand il avait le trac réellement, que Jean-Pierre était bon. » (1) Le père Émile Legault, directeur de la troupe Les Compagnons de Saint-Laurent, alla assister à une pièce où Jean-Pierre jouait un empereur de Rome et le père Legault le remarqua. C’était à la fin des années 1930, son chemin était tracé, mais pour l’instant, il l’ignore.

En effet, il décidera de faire ses études universitaires en droit. Pour payer ses études, il fera du théâtre et il travaillera sur des bateaux à Sorel durant la Deuxième Guerre Mondiale. Pendant son séjour à l’Université de Montréal (1939 à 1943), sa fiancée n’aimait pas qu’il pratique le théâtre, parce que ça lui enlevait du temps pour étudier. Il a réussi ses examens du Barreau, mais il préférait le monde de la scène et de la radio.

Jean-Pierre était reconnu, chez Les Compagnons de Saint-Laurent, comme un type qui aimait rire et jouer des tours, Jean-Louis Roux raconte une anecdote qui s’est produite à Saint- Raymond de Portneuf : « Il fallait rentrer au chalet en chaloupe et souvent, c’était George Groulx qui ramait et c’était Jean-Pierre qui dirigeait derrière, qui donnait la direction de la chaloupe. Alors Jean-Pierre s’arrangeait pour que la chaloupe tourne en rond et alors il engueulait George Groulx en lui disant : « Mais George, qu’est-ce que tu fais? » George lui disait : « Ben, j’rame, j'rame » Évidemment, tout le monde était au courant et on s’amusait beaucoup » (2)

Avant d’être un téléroman, La famille Plouffe était présentée à la radio. Jean-Pierre jouait le rôle d’Ovide Plouffe. En 1953, un an après l’arrivée de la télévision, on annonce que La famille Plouffe deviendra un téléroman, ce sera le premier fait au Québec. Jean-Pierre refusa d’interpréter le personnage d’Ovide Plouffe, jugeant qu’il n’avait pas le style d’un intellectuel. L’auteur Roger Lemelin a fait quelques tentatives pour le faire changer d’idée, mais en vain. Il jouera dans ce feuilleton, dans le personnage de Léonidas. Plus tard, il décrochera le rôle de sa vie.

Depuis 1933, à l’aide du roman Un homme et son péché, les gens avait fait connaissance avec un nouveau personnage qui marquera profondément le Québec, Séraphin Poudrier, un avare sans pitié, écrit par Claude-Henri Grignon. On joua Un homme et son péché au théâtre, à la radio et au cinéma, toujours avec un grand succès. En 1956, Un homme et son péché devient un téléroman qui va connaître un immense succès et portera le nom : Les Belles Histoires des pays d’en haut; il est à noter que cette émission possède le record de télédiffusion, soit 14 ans.

Des auditions sont déclenchées. Pour trouver l’acteur qui incarnera le personnage de Séraphin Poudrier, la lutte est très chaude, Yvon Leroux explique : « Au moment des auditions, le producteur Paul L’Anglais me révèle comme en confidence, que le commanditaire n’a pas encore arrêté son choix, quant à l’âge que devrait avoir ce rôle principal au début  de la série. S’il est dans la vingtaine, je serai le seul candidat sur les rangs. La situation sera la même pour Robert Rivard, si Séraphin a franchi le cap des trente ans. Jean-Pierre Masson auditionnera lui pour le personnage ayant atteint l’âge mûr. Ce que monsieur L’Anglais ne me dit pas, et c’est de bonne guerre, c’est que les commanditaires n’ont surtout pas décidé, s’ils préfèrent que ce personnage important soit confié à un comédien peu connu, à un autre qui profite déjà d’une certaine popularité ou purement et simplement à une vedette établie. » (3)

Jean-Pierre Masson avait l’âge mûr et était une vedette établie, c’est ainsi qu’il reçoit le rôle. Yvon Leroux jouera plus tard le personnage de Bidou Laloge, le beau-frère de Séraphin. Dès le moment où il mettait son costume, il rentrait parfaitement dans la peau du personnage. Il n’avait pas besoin de maquillage, tout ce qu’il avait à faire, c’était de se peigner et sa figure changeait totalement. De 1956 à 1967, ce téléroman est télédiffusé en direct, ce qui veut dire que les blancs de mémoire ne sont presque pas permis. Jean-Pierre en avait, René Caron raconte : « Il en avait souvent, mais il était tellement habile, que ça ne paraissait pas. C’est seulement plus tard, que j’ai su que ça lui arrivait souvent. C’était un gars qui possédait son art, à ce moment on travaillait en direct. Alors, quand on avait des blancs de mémoire, il fallait improviser, lui, il faisait en sorte que son débit était très lent, alors, ça lui permettait de penser à autre chose et il remplissait le temps. Nous autres, nous travaillions avec lui et on s’en rendait plus ou moins compte. Il était devenu un expert. » (4)

Ses anciens camarades du Séminaire étaient fiers et surpris en même temps de le voir jouer un rôle principal que celui de Séraphin, François Crépeau explique : « Ah! Je trouvais ça drôle. Je me disais toujours : « Comment ce qu’il fait pour apprendre ce rôle-là dans une semaine. »(5) Années après années, de nouveaux jeunes comédiens rentraient dans la distribution des Belles Histoires et Jean-Pierre aidait aux jeunes comédiens afin qu’ils se sentent plus à l’aise. Réjean Lefrançois a reçu son aide : «  Il y avait une belle collaboration. Il nous aidait beaucoup. Il nous disait : Veux- tu qu’on refasse la scène un peu avant l’enregistrement? »… Alors de sa part, c’était vraiment magnifique, parce qu’il avait d’autre chose à faire que d’aider les gens et il le faisait tout le temps. »(6) Il vivait assez bien du fait que les gens le reconnaissait dans la vie quotidienne, du moins durant les années que ce téléroman a duré, car après 1970, il trouvait ça pas mal moins agréable.

Andrée Champagne, avec qui il a beaucoup joué durant 14 ans, dit : « Si je pouvais voir les yeux de Jean-Pierre, il m’était facile de déceler une difficulté qui s’amorçait. Ses yeux normalement si bleus devenaient soudainement gris, comme vitreux. Je faisais de mon mieux pour le remettre sur la piste. Il me rendait la pareille si je me trouvais aux prises avec le même problème. » (A)

Après 14 ans de télédiffusion, Les Belles Histoires des pays d’en haut se terminent le 25 mai 1970. Le public ne pourra plus voir les comédiens interprétant leur personnage original, mais il ne les oubliera jamais. Le fait que le personnage joué par Jean-Pierre Masson n’était pas aimable, n’a pas aidé à se retrouver d’autres rôles importants. Oui, il a joué dans d’autres émission, comme Symphorien et Grand-papa par exemple, mais le public voyait toujours Séraphin dans Jean-Pierre Masson, même vers la fin de sa vie, les gens l’identifiait à ce personnage, c’est dur pour le moral. Il était devenu, pour le public et les réalisateurs, Séraphin Poudrier.

Il mêlait son personnage à lui, Élizabeth LeSieur explique : « À un moment donné, c’était devenu comme un personnage mélangé à lui-même, il racontait une blague et tout à coup, il la racontait en Séraphin, au lieu de la raconter en Jean-Pierre Masson. » (B)

Entre 1970 et l’année de son décès, 1995, sa vie s’assombrit. Lorsqu’il allait frapper à la porte des réalisateurs, ils lui disaient que le public devait oublier son personnage. Il devenait de plus en plus aigri, mesquin avec ses camarades. Il est même devenu alcoolique, malheureusement, lui qui était reconnu pour son sens de l’humour, ne riait presque plus.

À Poettsville, près de Philadelphie en Pennsylvanie, le 11 mars 1995, Jean-Pierre Masson est retrouvé mort dans sa chambre d’hôtel, seul. Il est décédé d’une crise cardiaque. À l’annonce de sa mort, le public trouva triste qu’il soit mort seul, oublié de tous et méprisé; à un certain point, à cause de son personnage (disparu depuis 25 ans) qui lui a collé à la peau, malgré lui. Les gens semblaient adorer et admirer Jean-Pierre, alors pourquoi les mêmes gens lui criaient des noms et des injures (légèrement moins à la fin de sa vie) et n’a jamais plus joué de grands rôles à la télévision, à cause d’un personnage disparu, je le répète, depuis 25 ans ?

Ses amis lui rendirent un beau témoignage.

Guy Provost
« C’était un excellent camarade pendant des années, que je considérais comme un excellent comédien avec qui j’avais énormément de plaisir à jouer. » (7)

René Caron
« C’était un excellent comédien, comédiens très intelligent. À ce point de vu, c’était un de nos bons » (8)

Thérèse Cadorette
« Je l’estimais beaucoup et j’ai joué de beaux rôles, dans les télé- théâtres et quand j’ai joué dans Les Belles Histoires, je l’ai toujours trouvé très gentil et très correct. » (9)

Paul Hébert
« On se voyait assez souvent quand il était propriétaire du Café des Artistes. J’allais souvent manger là et je rencontrais Jean-Pierre et on avait toujours du plaisir. » (10)

Roland Chenail
« Jean-Pierre avait fait son Droit, avait appris le chant et nous chantait des romances… Très belle voix de baryton.  Un excellent camarade, j’en ai gardé un excellent souvenir et j’ai trouvé que c’était une fin triste, mais que voulez-vous, le destin est là? » (11)

L’abbé Fernand Larochelle
« Moi, ce que j’aimais de lui, c’est quand il marchait, une démarche un petit peu bonhomme, toujours le visage souriant, toujours envie de rire, toujours un gars qui aimait avoir du « fun. » Il aimait la vie et ses confrères. » (12)

01 - Entretien avec Mgr Gérard Dupuis, le 29 septembre 1999
02 - Entretien avec Jean-Louis Roux, le 17 juillet 1999
03 - Lettre d’Yvon Leroux, le 17 décembre 1999
04 - Entretien avec René Caron, le 5 août 1998
05 - Entretien avec François Crépeau, le 17 octobre 1999
06 - Entretien avec Réjean Lefrançois, le 8 juillet 1999
07 - Entretien avec Guy Provost, le 9 juin 1998
08 - Entretien avec René Caron, le 5 août 1998
09 - Entretien avec Thérèse Cadorette, le 9 décembre 1998
10 - Entretien avec Paul Hébert, le 2 juillet 1999
11 - Entretien avec Roland Chenail, le 10 juillet 1999
12 - Entretien avec l’abbé Fernand Larochelle, le 28 septembre 1999

(A) Lettre d’Andrée Champagne, le 9 septembre 1998
(B) Entretien avec Élizabeth LeSieur, le 5 juillet 1999


Jean-Pierre Masson - Séraphin Poudrier


Texte d’Étienne Binet

Photo - Collection Jean Layette

1939 - Hector Charland


Hector Charland

1er Juin 1883 - 27 Décembre 1962

Hector Charland est né à l'Assomption, le 1er juin 1883, dans le rang du Point du Jour Sud, fils de Louis Charland et de Marie-Lina Baignet. C'est l'année de l'inauguration de la salle académique du Collège de l'Assomption... C'est l'époque où s'est imposé le modèle des tournées théâtrales européennes et américaines, la première visite de Sarah Bernhardt et surtout l'arrivée du vaudeville américain qui attire le public populaire. Rappelons qu'il n'y a pas 10% des activités théâtrales qui se donnent en français a Montréal! Encore écolier, Hector gagne un concours où il récite l'évangile du dimanche des Rameaux. Il est tellement ému qu'il perd connaissance: il a trouvé sa vocation et elle ne le lâchera plus. Il étudie au Collège de l'Assomption, où évidemment, il joue sur la scène de la salle académique. Il se forme en droit et voulant assurer un revenu régulier à sa famille, il accepte le poste d'assistant-greffier à la cour d'appel de Montréal. Il sera acteur, en même temps, quasi à plein temps.

Dans les années 1910, il interprète les rôles les plus variés, du classique au contemporain. Il fait partie des cercles artistiques : Ville-Marie, Lapierre, Melançon. Il ne joue évidemment pas pour l'argent mais "pour satisfaire sa passion terrible et délicieuse". Un aspect moins connu de sa carrière : il est mêlé à l'avant-garde théâtrale, avec la troupe Les Compagnons de la Petite Scène (un des directeurs est Alfred Vallerand) qui se propose de faire connaître le "théâtre actuel". En mars 1923, en s'inspirant de Jacques Copeau et de ses mises en scène au Vieux-Colombier de Paris, la troupe présente Le mort à cheval, d'Henri Ghéon. Elle ajoute Michel Auclair de Charles Vildrac. Une belle controverse s'ensuit. Cette troupe veut se distinguer "des troupes de tournée, des scènes régulières et de leurs concurrents amateurs". Elle a des imitateurs, des gens qui cherchent l'intégration des artisans de la création, dans la même quête de nouveauté et d'initié.

La Société Saint Jean-Baptiste de Montréal invite des groupes "modernes" au regroupement, au théâtre du Monument National, dans le même organisme central appelé les Soirées de Famille. Il n'y aura pas de "petit théâtre" expérimental... On voit l'étendue de son registre quand Hector Charland participe aussi aux Soirées du Bon Vieux Temps, animées par Conrad Gauthier. Il y croise Ovila Légaré et Juliette Béliveau. Dans ces mêmes années 1920, il joue régulièrement au théâtre du Gésu, appartenant au collège Sainte-Marie de Montréal. Presque un théâtre institutionnel. Il est alors membre du cercle dramatique des Anciens (sans en être un) et joue sur cette scène trois ou quatre fois par an, pendant 27 ans, les rôles principaux les plus divers : Flambeau dans l'Aiglon, Le Malade imaginaire, le Bourgeois gentilhomme, le gendre de monsieur Poirier, etc.

Une pièce événement sans équivalent dans l'histoire théâtrale lance sa popularité. L'abbé Jean d'Avila Ethier de Saint-Jérôme, compile des textes sacrés et monte en 1925, le drame par excellence : la Passion, en cinq actes et 25 tableaux, 421 personnages et 125 chanteurs. Hector joue le rôle du Christ. L'année suivante, on bâtit un auditorium pour cette pièce. À la première, le 16 août 1925, il y a 2500 spectateurs. Au moins 20 000 personnes à la première saison. On y tiendra des représentations tous les dimanches de 1925 à 1928, sauf l'hiver où l'on y joue au hockey... Durée de la pièce : de deux heures de l'après-midi aux "petites heures de la nuit"... On vient de partout, jusqu'en Nouvelle-Angleterre. Lorsque les dettes de la paroisse de Saint-Jérôme sont remboursées, les évêques font cesser ce "divertissement" dominical...

Hector Charland n'est pas sédentaire. Avec les cercles artistiques, il joue au Québec, en Ontario et aux États-Unis. Il débute à la radio, à CKAC, avec le premier radio-roman de la station Le curé du village, de Robert Choquette, en 1935-1938. Il le reprendra au cinéma, en 1949. Il sera également une des vedettes de l'émission Le Ralliement du rire avec Fred Barry et Gérard Delage. Et puis arrive Séraphin Poudrier, le rôle mythique d'une génération d'auditeurs.

En 1939, Radio-Canada demande à Claude-Henri Grignon, l'adaptation de son roman Un homme et son péché. Grignon donne à Charland le rôle de Séraphin Poudrier. Il interprète le rôle de l'avare, tous les soirs, durant 15 minutes, de 1939 à 1962. Durant sept ans la réalisation est signée Guy Maufette, et sera reprise ensuite par Lucien Thériault. Le succès est si grand que l'auteur écrit, en 1942 une série de sketches, les Paysanneries où Charland joue sur scène son fameux personnage.

Les "voix" de la radio sont alors visibles : Estelle Maufette (Donalda), Albert Duquesne, Amanda Alarie, Juliette Huot, Fred Barry. À Ottawa, après la représentation, des spectateurs veulent malmener le "maudit Séraphin". Charland a besoin de la police... Le cinéma s'empare de l'acteur. Un homme et son péché, sort en 1948,  Séraphin, en 1949. Dans ce dernier, Nicole Germain joue Donalda et Guy Provost, Alexis Labranche.

En 1956, la télévision toute neuve, s'empare elle aussi du roman. Charland ne joue pas Séraphin mais le père Évangéliste (le père de Séraphin Évariste Poudrier) dans Les belles histoires des Pays d'en Haut. Une époque se termine. Le personnage est devenu un type. Il va demeurer dans les consciences. On dit "un Séraphin" pour parler d'un avare. Le comédien peut sortir de scène. Déterminé comme un paysan, pionnier comme un défricheur. Il meurt le 27 décembre 1962. Il a réussi, fidèle à sa vocation.


Hector Charland - Séraphin Poudrier



Ce texte est une gracieuseté du Théâtre Hector Charland

Notes biographiques rédigé par Christian Morissonneau

Photo - Collection Jean Layette